ÉDITORIAL

France-Afrique 2.0 : de quelle diaspora africaine dont nous parle Macron ?

France-Afrique 2.0. Macron face à "la diaspora africaine de France"

Pour vendre sa France-Afrique 2.0, Macron a sélectionné 400 Français(es) d’origine africaine avec qui il compte dealer contre l’Afrique. Il les a appelé « La diaspora africaine en France ». Une diaspora qui paie ses impôts en France, vit en France et dont les réussites sont françaises. Les questions pré-enregistrées dans leurs smartphones auraient-elles été celles que notre légitime diaspora africaine aurait posée à Macron, si elle y avait été conviée.

NB : Je ne parlerais pas ici de l’ECO, la nouvelle monnaie que 15 pays de l’Afrique de l’Ouest pensent lancer en 2020 et dont de nombreux experts jugent ne pas être prête à exister, si oui seulement sur les écris. Je sais pourtant que cet échange a été conditionné par le souci de vendre la transformation du Francs CFA de l’Afrique de l’Ouest en ECO. Le changement de nom dans la continuité pour la France qui refuse de se mettre hors de la politique monétaire des Etats africains. Je vous réserve un article tout aussi géopolitique que celui-ci à ce sujet. « Nous voulons parler de l’Afrique par un prisme autre que le terrorisme au Sahel, ou l’enjeu sécuritaire ou migratoire, en abordant les partenariats économiques, culturels, universitaires ou citoyens. Nous aborderons aussi les deux grandes initiatives de 2020, le sommet Afrique-France en juin à Bordeaux et la saison culturelle africaine de juin à décembre », l’Elysée, Présidence française.

La diaspora France-Afrique tournée vers la France

Ceux que Macron a invité à son échange du 11 juillet 2019 ne payent pas leurs impôts en Afrique, beaucoup n’ont pas une seule entreprise dans leur pays d’origine. Ils sont intellectuels, artistes, hommes et femmes d’affaires, la fierté de la race noir pour certains, la honte de la lutte pour la libération des peuples noirs pour d’autres. Mais rien n’a échappé aux Africains du continent qu’au-delà de cette appartenance originelle qui les lie à ceux-là, c’est à la France que revient le fruit des efforts de ces frères au quotidien. Et ceci à juste titre : ils sont tous Français, d’origine africaine. Une belle enseigne de communication en somme pour les intérêts de la France qui continue à ne pas voir qu’en face il y a du répondant.

Ceux qui sont de notre diaspora vivent hors du continent mais investissent massivement pour le bien des peuples noirs vivants sur la terre de leurs ancêtres. Notre diaspora payent ses impôts en Afrique, y construit les écoles, y bâti des maisons, finance des projets de développement, renvoie leurs enfants en vacance au pays, et ne s’arrêtent pas au seule envoi d’argent à la famille. La diaspora africaine est celle qui a compris que lutter à être « monsieur » approuvé par le blanc est un faux combat. Le seul combat qui vaille est celui du développement du continent, non plus celui de faire des choses en Europe pour paraître évolué, mais de les faire en Afrique, comme et plus que les Chinois qui, pour faire cesser l’insulte du « rire jaune » dans le monde, ont tout simplement développé leur Chine natale. La majorité de ces 400 individus invités de Macron, certains n’ont cure de ce qui se passe en Afrique, leur situation en France est prioritaire.

La France-Afrique 2.0

A l’exemple de Eisa, Ornella et Brandy, des étudiants nés en France pour qui « c’est ce qui se passe en France qui nous intéresse vraiment. Les questions du commerce avec l’Afrique, du franc CFA, de la souveraineté ne nous touchent pas directement. Ce que l’on veut, c’est que l’on trouve des solutions à la discrimination qui nous touche au quotidien ». Alors que Macron et ses stratèges pensent jouer sur l’appartenance raciale pour injecter à coup de milliards, comme toujours, des pions acquis, volontairement ou non, conscients ou pas, à la cause française en Afrique, il doit savoir que son tour de passe-passe ne mord pas. La France aura beau donner des moyens financiers, des épaules politiques et des garanties claires obscures à ceux qu’il a dit « avoir prochainement le destin de l’Afrique entre leurs mains », l’Afrique se fera sans les Gaulois.  Peu importe d’avoir associé le président du Ghana à son entourloupe.

En plus, Nana Akufo-Addo semblait même gêné au moment de son show. Pour Macron, il s’agissait tout simplement de s’afficher avec le n°1 du pays de Nkwame Nkrumah, l’un des pères du panafricanisme. Ce que Nana Akufo-Addo avait certainement vu arriver avec cette invitation, mais le président français en a profité pour aller beaucoup trop loin, comme toujours jouer son show en improvisant des réponses qui apparemment ne passaient pas pour ce grand Africain qu’on a vu prôner le retour aux sources et à l’identité culturelle africaine le jour de son investiture. Gêné mais bien diplomate, il a gérer son impatience à quitter la salle sans faire honte à son hôte. « Il faut finir avec l’histoire du père Noël qui va venir pour développer le continent. Il n’y a que nous qui pouvons développer notre continent. Il n’y a pas de père Noël. Une fois que cette mentalité devient la nôtre, cela change le regard et les relations avec la France, avec l’Europe », Nana Akufo-Addo.

Cheval de troie

Dans sa promotion de la nouvelle France-Afrique, il fallait tout aussi se oindre de l’aura que lui prêterait un pays africain qui n’a pas le français pour langue officielle, afin de présenter la nouvelle relation comme celle qui fédère en son sein toutes les obédiences politico-linguistiques du continent. Seulement, Macron une fois de plus a fini par énerver les Africains qui étaient déjà loin de lui pardonner son faux pas au Burkina Faso, où il était allé ridiculiser le président Kaboré en novembre 2017. Et avant lui, le président Malien qu’il a déplacé de la Capitale vers Gao, à la base militaire Serval.

Cet individu à l’art de la duplicité comme le pays qu’il dirige en fait. Mais la France est un pays à qui personne ne peut plus faire confiance, du moins tout le temps de la « Macronie » et de la politique extérieur de cet Etat qui en fait l’un des entrepreneurs de guerre et de chaos partout dans le monde. Tenez, elle est le jour avec la résolution de l’embargo sur la vente d’armes au Yémen et en Libye, pourtant dans la nuit elle est en train de dealer avec les différents belligérants dans ces pays. Elle vous parle de la diaspora africaine mais choisi des Français à la peau noire pour lui poser des questions bien enregistrées dans leurs smartphones. Les Etats-Unis ont ses « Young leaders », des citoyens américains issus d’autres Etats, qui sont formés pour être avec l’appui des Américains des leaders de l’Afrique de demain.

Un peu d’orgueil !

Ils sont formatés à la vision américaine du monde, forgés en l’idée de prendre le pouvoir politique et économique dans leur pays d’origine au bénéfice des USA. Paris, vassal de New York D.C, semble lui emboîter le pas avec des rencontres que Macron, le Young leader américain de 2012, dont le premier ministre Edouard Philippe en est de la promotion de 2016, veut instituer en quelque chose d’où sortiront des réflexions pour une transformation encore plus profonde, une européanisation ou mieux une francisation plus poussée de certains Etats africains. La diaspora dont parle le français Macron est une bombe à retardement que la France ambitionne d’utiliser contre le continent, maintenant qu’elle n’a plus d’emprise en Afrique, et que seuls résistent encore quelques relents de colonialisme. « Les diasporas ont un rôle essentiel. Elles connaissent les codes, les accès. Elles sont nos meilleurs ambassadeurs pour dire comment la France, l’Europe et l’Afrique peuvent mieux travailler ensemble », Macron.

Depuis ces échanges avec Macron et sa diaspora à lui, aux côté du Président Nana Akufo-Addo du Ghana, les Africains ont compris qu’après le dernier-né de la déstabilisation des Etats qu’est le terrorisme, les entrepreneurs de guerre au sein des institutions françaises viennent d’activer officiellement leur plan C ou D. Peu importe. Mais nos frères ne sont pas du tout naïfs. Les Afro-descendants et les Africains qui ont la nationalité des nations non Africaines savent que leur avenir est en Afrique, et sans la France et les occidentaux. Ils savent qu’au-delà d’une nationalité qui se perd comme elle se gagne, au-delà de l’importance opportuniste que tu gagnes avec cette France, elle sait te rappeler d’où tu viens à chaque fois que son intérêt est en jeu. On sait que beaucoup tels que Amobe Mevenguè, Claudy Siar, Elisabeth Tchoungui la modératrice et bien d’autres dans cette salle et ailleurs dans le monde sauront dire stop et ne pas franchir la ligne rouge déjà visible.

En somme

Je terminerai cet éditorial avec cette réflexion de Nana Akufo-Addo le président du Ghana devant un Macron très gêné, que je paraphrase en ces termes : Je vais vous parler franchement. Je vais vous dire ma conviction personnelle. Tous les Africains, tous les noirs du monde doivent savoir que leur avenir est en Afrique. Qu’ils soient en Europe, aux Amériques, partout dans le monde, être noirs leur suffit. Le jour où nous, noirs, Africains, auront fait de l’Afrique une puissance politique, économique, financière, le regard des autres nations changera à notre égard. Lorsque j’étais étudiant en Angleterre, personne ne voulais apprendre le Mandarin. Personne ne voulait faire une heure de cours pour cela, mais le cours n’a pas été supprimé et le professeur le proposait à chaque année. A présent, on se met en rang pour y aller, espérant y trouver une place. Qu’est-ce qui a changé ? Rien. C’est le même cours avec les mêmes chapitres. Ce qui a changé est ailleurs. La Chine est devenue une puissance.

Saimondy

Directeur de la publication de Saimondy. Analyste géopolitique, Journaliste-écrivain, artiste musicien et producteur. Téléphone : +237 - 699340064 / Email: saimondy@gmail.com

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One thought on “France-Afrique 2.0 : de quelle diaspora africaine dont nous parle Macron ?

  • Analyse sans concession, parfois des vérités pénibles pour les concitoyens. Comme toute vérité. Que les jeune étudiants ne soient pas le moins du monde intéressés par le devenir du continent est normal. En France, un maghrébin parle de ses origines à sa descendance. Le subsaharien lui parle français.

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