Budget de l’État : comprendre la proposition indécente du Gicam
Personne ne nie que la pression fiscale soit déjà assez forte au Cameroun, avec d’ailleurs une possible augmentation de 0,8% en 2023, selon nos sources. Depuis des années, le Groupement inter-patronal camerounais (Gicam) est en dialogue permanent avec le Gouvernement. Avec par moment des désaccords qui sortent des concertations privées, voire secrètes.
Malgré la hauteur de l’imposition au Cameroun, il y a des avantages que bénéficient les entrepreneurs privés, qui sont de l’ordre d’un allègement des contributions au niveau du fisc. La visite du DGI dans la capitale économique, Douala, consiste aussi à désamorcer le braquage des positions dans le domaine des prix et de la disponibilité des produits. Une sorte de « main tendue » du Gouvernement, d’autant plus qu’une baisse de la pression fiscale fait naître des moyens de continuer à manufacturer.
La tournée du DGI dans les sociétés membres du Gicam
Depuis ce 13 septembre 2022, Modeste Mopa Fatoing, Directeur Général des Impôts (DGI) a entamé des concertations avec les opérateurs économiques. Une tournée qui vise à préparer la prochaine Loi de finances 2023. Cependant, le langage semble plutôt être celui de l’insatisfaction dans les deux camps. Mais beaucoup plus dans celui du patronat qui donne l’impression de vouloir imposer des choses au Gouvernement.
Ce qui fait dire à certains observateurs du milieu d’affaires camerounais que le Gicam serait plutôt piloté par ceux qui ont tout intérêt de phagocyter l’économie du Cameroun et de mettre en difficulté le Gouvernement actuelle au pouvoir. Le Gicam a été créé le 12 juin 1957 sous la dénomination de Groupement interprofessionnel pour l’étude et la coordination des Intérêts économiques. Il est devenu le Groupement interprofessionnel en 1992.
Le poids économique du Gicam
Depuis l’arrivée en 2017 de Célestin Tawamba (PDG de Cadyst Invest) en remplacement d’Armel François, PDG de PHP, qui avait pris l’intérim après la mort en 2016 d’André Fotso de Holding TAF Investment, les rapports entre secteur privé et secteur public semblent s’être encore bien tendus. Le nouveau patron rappelant à chaque fois le poids économique de l’organisme qu’il dirige. La masse salariale cumulée des entreprises du GICAM est de 1 061 milliards de FCFA. Les impôts et taxes intérieurs cumulés sont de 1 783 milliards de FCFA.
Un chiffre d’affaires cumulé de 9 860 milliards de FCFA, soit : 76,8% du chiffre d’affaires cumulé des entreprises modernes, 64,8% du chiffre d’affaires cumulé des entreprises et établissements, 47,3% du PIB marchand et 43,5% du PIB total. 221 075 emplois permanents soit : 54,3% des emplois permanents des entreprises modernes (entreprises modernes sont les entreprises assujetties à la Déclaration Statistiques Fiscales (DSF)), 27,2% des emplois permanents des entreprises et établissements.
Envie hégémoniste
Dans la Répartition du Budget de l’Etat en 2019, le Gicam c’est un montant des recettes fiscales de 2 048 milliards de FCFA, soit : 70,0% du total des recettes fiscales, 39,3% du Budget de l’Etat (Sources : Fichier des entreprises du GICAM, Gicam 2019). On se rappelle qu’en 2020, le Groupement avait contesté la légitimité de la chambre de commerce, des mines, et du développement technologique (Ccima, une chambre consulaire), proposant de redéfinir les critères de représentativité des organisations patronales et professionnelles.
En 2022, Monsieur Tawamba propose que le Gicam soit consulté avant toute élaboration d’une Loi de Finances au Cameroun. Pour ceux qui ne comprennent pas où il veut aller, il faut dire que toute Loi de Finance est faite déjà sur la base des concertations du secteur public avec le privé, le Gicam dans des plateformes économiques et les rencontres avec le Premier Ministre Chief Dion Nguté. Cette demande, si elle est acceptée, pourrait aboutir à la longue à un remplacement du Conseil Economique et Social (certes, qui pour beaucoup de Camerounais semble ne jouer aucun rôle efficace depuis des décennies.
Un duplicata infructueux
Mais nous en parlons ici en tant qu’institution républicaine). Ceci pourrait aussi, si une place directement consultative est acquise au sein de l’Hémicycle par le Gicam, augmenter automatiquement l’influence du patronat camerounais dans la politique fiscale. Ce dernier pourrait par exemple bloquer prochainement une loi à caractère économique qui lui est défavorable en agissant sur le rejet des actes politico-économiques du Gouvernement.
Mieux que ce qu’il fait déjà. Même si cette loi ou décision est favorable à la bonne marche de l’économie ou aux autres entreprises hors de son giron. On ne peut faire juge et partie. Il ne va manquer à Monsieur Célestin Tawamba et son groupement que de demander à élaborer la Loi des Finances par eux-mêmes et la faire juste entériner par le Gouvernement.
ONG et multinationale
Il est claire qu’après les ONG qui ont tendance à réguler l’ordre public et les codes moraux dans la société depuis 1990, les multinationales qui veulent également se substituer à l’Etat, fortes de leur budget de fonctionnement parfois 10 fois supérieur à celui de certains pays, voici que des mouvements patronaux présentent des envies de remplacement de l’Exécutif et du parlementaire dans l’élaboration de sa politique fiscale.
Ce que n’a pas pu une certaine opposition politique africaine tenue en fils rouge de la bombe sociale par les marionnettistes, ceux qui agissent dans l’ombre contre les intérêts des pays africains, pensent le réussir avec le patronat. (LIRE AUSSI : Sport : le ministre des finances Louis Paul Motaze désigne OUM DE DJON Jean Armel agent comptable des fonds des Lions).
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